Attendre un fantôme- Stéphanie Kalfon
Joëlle Losfeld Éditions, juin 2019, 129 pages
Kate, jeune fille de dix-neuf ans, apprend par sa mère que son amoureux Jeff est mort dans un attentat en Israël. Kate doit encaisser la nouvelle, surtout que le décès a eu lieu quelques semaines auparavant, sa mère, voulant la préserver, lui a caché. Oui mais voilà, comment faire un deuil en étant sous l’emprise maternelle, oppressante et étouffante. « Dans quelques minutes, elle va s’emparer de ma vie, mon chagrin, m’engloutir noyée vivante dans la parole. »
Attendre un fantôme est un récit familial. Celui des relations fortes et destructrices. Il explore les entrailles d’une relation à double courant. Cette mère qui de prime abord nous semble bienveillante se révèle au final être un démon, ne faisant qu’enfoncer sa fille dans un mal-être psychologique puissance 1000. « Que serait la mère si elle n’était plus le centre nucléaire de son minuscule monde ? » Kate subit, elle n’a que ça à faire et ne sait faire que cela. Mais cette perte de l’être aimé est un électrochoc, une roue de secours, une brèche pour qu’enfin Kate existe ou tout du moins essaie d’exister en dépit de cette mère corrosive. Ne plus attendre pour vivre sa vie. Stéphanie Kalfon m’a une nouvelle fois séduite dans son écriture. La puissance des mots nous donne à détester cette mère avec la boule au ventre, impuissante. L’envie de tendre la main à Kate, de lui dire va-t’en, souffle, respire, on n’a qu’une vie. La rancœur ne m’a pas quittée de toute la lecture, jusqu’à la dernière ligne. Un second roman qui questionne sur le sens et l’intérêt ou pas des relations familiales.
« Être malheureux, c’est attendre un fantôme. »