À la ligne- Joseph Ponthus
La Table Ronde, janvier 2019, 272 pages
Grand Prix RTL/Lire 2019
Prix Régine Deforges 2019
Prix Jean Amila-Meckert 2019
Prix du premier roman des lecteurs de la Ville de Paris 2019
Joseph Ponthus est éducateur spécialisé à Nanterre mais son mariage l’amène à suivre sa femme en Bretagne. Nouveau départ mais le travail manque dans sa spécialité. Il s’inscrit donc dans une boîte d’intérim et va être confronté au milieu de l’agro-alimentaire. De la conserverie de poisson à l’abattoir, il enchaîne les missions car il faut bien manger et payer les factures.
Dans ce roman autobiographique, Joseph Ponthus retrace cette nouvelle vie, en vers libres. Un procédé que j’ai découvert en littérature jeunesse et que j’apprécie particulièrement. Par ce processus, il rapporte les faits et gestes des ouvriers, des intérimaires, des gros travailleurs, des lève-tôt, ceux dont les corps sont usés et fatigués par la dureté du travail. L’usine est ce monstre qui broie l’Homme et son âme pour n’en faire qu’une machine à rendement.
« À l'usine
L'attaque est directe
C'est comme s'il n'y avait pas de transition avec le monde de la nuit
Tu re-rentres dans un rêve
Ou un cauchemar
La lumière des néons
Les gestes automatiques
Les pensées qui vagabondent
Dans un demi-sommeil de réveil
Tirer tracter trier porter soulever peser ranger Comme lorsque l'on s'endort Ne même pas chercher à savoir pourquoi ces gestes et ces pensées s'entremêlent
À la ligne »
Heureusement, Joseph Ponthus se sauve et convoque Aragon, Apollinaire, Dumas, Trenet et bien d’autres. Il récite, chantonne, pour survivre dans ce monde violent qu’est l’usine.
Les mots de Joseph Ponthus sont à la hauteur du sujet si éprouvant, traités avec une telle force que cela ne nous quitte plus le livre fermé. Un premier roman qui tape du poing sur la table.
« Je pense au fameux vers de Shakespeare où le monde est une scène dont nous ne sommes que les mauvais acteurs. »