De minuit à minuit- Sara Mychkine
Le bruit du monde, février 2023, 134 pages
Une femme, tombée dans la toxicomanie, écrit à sa fille. Elle n’a que peu de temps pour coucher sur papier ce déchirement. En effet, sa fille lui est retirée. Une Colline les sépare.
« Si tu savais à quel point j’ai été égoïste en te mettant au monde. À quel point je t’ai attendue, comme si la vie, jusqu’ici, n’avait été qu’un grand désert. À quel point j’ai prié pour que tu m’aimes comme, jamais, je n’ai été aimée. À quel point, même alors que tu cognais sous les plis de ma chair, j’ai laissé le crack remplir toutes les brèches du souffle. »
Immense coup de cœur pour ce roman en vers libres d’une puissance assez remarquable. La découpe du texte en ‘mouvement’ fait monter la tension tout du long et prend aux tripes. Le contenu est sombre et dénonce un quotidien de misère et de violence. La Colline, comment peut-on fermer les yeux sur cet endroit ?
« Tu sais, les gens comme nous, les addicts, les rebuts d’être, faudrait pas croire qu’on est faibles, déments, nés tordus et enclins à la laideur. Notre seul tort, c’est de continuer à vouloir vivre
encore et
encore et
encore. »
J’ai eu mal au ventre par ce cri poussé par Sara Mychkine. Cette relation mère/fille, qui n’en est pas une à mes yeux, mais qui finalement est remplie d’amour car oui il est bien question de ça.
« Si tu savais,
je t’aimerai jusqu’à ce qu’ils me tuent,
parce qu’ils finiront par nous tuer,
à menton-poignard
d’indifférence.
Mais je t’aimerai
jusqu’au bout et au-delà encore.
Je t’aimerai pour tous leurs silences, ma douce. »
Chaque mot
frappe
fort
Sublime