Les nuits bleues- Anne-Fleur Multon
Les Éditions de l’Observatoire, janvier 2022, 204 pages
À Paris, la narratrice rencontre pour la première fois une jeune femme.
« Elle s’appelle Sara. Sans H. C’est pas mal Sara sans H, non ? »
Quelque chose se produit entre les deux femmes. Hélas, elles n’ont guère le temps d’échanger que la France entière est confinée. C’est donc à distance qu’elles apprennent à se connaître. Des messages. Des photos. Des confidences. Des promesses.
« On s’est fait l’amour très vite. On s’est fait l’amour sans s’être jamais vues. On s’est fait l’amour sans s‘être jamais senties. On s’est fait l’amour sans jamais avoir pris un verre, été à une expo, à un ciné. On s’est fait l’amour sans goûter nos langues, l’odeur de nos nuques, la sueur peut-être, sans voir le trouble dans les yeux. »
Et puis, vient le moment du premier rendez-vous, des premières fois…
« Quand on pensera à l’amour ce jour-là, on se souviendra du désir qui était presque une troisième personne entre nous. On comprend soudain qu’il est possible d’être physiquement ivre de désir. Contre le canapé on titube on voit flou la tête nous tourne on souffre presque
il n’y a jamais assez de peau qui touche l’autre. »
J’ai aimé chaque mot, chaque phrase, chaque passage de ce texte si intime. La narration d’Anne-Fleur Multon est osée. Un mélange de poésie et de mots crus, de prose et de SMS. L’effet sur moi est réussi. C’est avec des papillons dans le ventre et une intensité des sentiments que j’ai lu ce roman. Les pages se tournent, je souris, suis impatiente, émoustillée. Curieuses sensations.
Une vraie histoire d’amour que l’on dévore sans hésiter, ne faisant jamais dans le pathos grâce à la plume d’Anne-Fleur Multon.
« Vos yeux
pendant la promenade pendant les courses
Une heure réglementaire
Une heure seulement
mais vos yeux
qui nous regardent scrutent jugent accablent observent
insultent se branlent fantasment
se détournent
trop vite
ou pas assez
Vos yeux partout
Tout le temps
Avec nous. "