Un garçon c’est presque rien- Lisa Balavoine
Rageot, août 2020, 256 pages
Rentrer dans une case. Pour Roméo, il en est hors de question. Aux yeux des autres, c’est un être différent, hors catégorie, hors-jeu. Essuyant les moqueries, Roméo préfère jouer la carte de l’invisibilité et observe. Il ne s’attendait pas à faire, un jour, une rencontre qui changera tout.
« Je ne sais pas où est passée ma testostérone,
Et je n’ai pas envie de la trouver,
Je voudrais juste ne plus entendre,
Toutes ces injonctions,
Et ne pas avoir à jouer
Ce rôle qu’on veut nous donner. »
« Peut-être que c’est comme ça
Les filles, les garçons
La vie, les envies
Les promesses, les désirs
Ça ne file jamais tout droit
Ça dévie de sa trajectoire
Ça fait des embardées
Ça finit dans le fossé
Peut-être
Que je m’y prends mal
Que je n’y comprends rien
Que je n’ai pas les codes
Pas les clés
Peut-être que c’est comme ça
Les sentiments
Ça vient ça va
Ça nous tient à distance
Ça ne file jamais tout droit
Peut-être
Que je pourrais
Savoir ce dont j’ai envie
Au lieu de tourner autour de moi
Comme ça
Sans jamais rien décider.
Il y a des jours
Où j’en ai marre
Marre de moi. »
On a tous déjà entendu la chanson d’Eddy de Pretto « Kid ». C’est cette même musique qui ouvre la bande originale d’Un garçon c’est presque rien. « Tu seras viril, mon kid. Je ne veux voir aucune larme glisser. Sur cette gueule héroïque et ce corps tout sculpté. Pour atteindre des sommets fantastiques. Que seule une rêverie pourrait surpasser. » Vous avez bien compris. Le ton est donné et ça va dépoter.
Lisa Balavoine pose ses vers libres en de courts chapitres rendant la lecture très rythmée comme pour nous signifier une urgence. Le message qu’elle véhicule dans son roman n’est pas choisi au hasard. Étant professeure documentaliste, elle est au plus près des ados, peut en observer les comportements et ainsi les retranscrire au plus proche dans son texte. Et elle ne fait pas dans la dentelle. La réalité est bien là. Terminé les ados bisounours. Et bonjour le harcèlement. Lisa Balavoine interroge le lecteur sur ce sujet un peu trop banalisé mais ô combien dramatique. Notre société prône la perfection, utilise des codes et des cases dans lesquelles chacun doit rentrer sinon t’es mort ! Le sujet est grave, je vous l’accorde mais l’écriture est belle, poétique. Aussi sombre soit-il je le trouve lumineux. Il donne la parole à un garçon à part, qui doute sans cesse, découvre l’amour et la beauté du geste.
Un garçon c’est presque rien, à lire pour ne jamais être seul.