Le corps d’après- Virginie Noar
Éditions François Bourin, août 2019, 249 pages
Donner la vie, c’est rendre la mort possible en même temps. C’est terrifiant et merveilleux.
Je me suis protégée de ce livre en refusant de le lire. Une amie m’avait dit ‘qu’il n’était pas pour moi, pas après ça’. Je l’ai écoutée. Parce que ‘Ça’ m’avait brisée et elle avait raison. Ne pas resombrer dans ces souvenirs douloureux contre lesquels je me bats et tente toujours de trouver des réponses. Peut-être n’y en a-t-il pas finalement. Il faut vivre avec comme disent les gens, faisant de cet évènement une normalité. Mais en quoi ‘Ça’ est-il une chose banale ? Qui l’a décidé ? Qui parle en mon nom ? Alors j’ai eu envie de lire ce texte, peut-être pour me consoler, m’apaiser et comprendre ce Corps d’après.
Un bébé devenu Elle. Elle, se transforme. Elle, me transforme. Elle fait de moi une femme mère. Elle me fabrique corps merveilleux. Elle a besoin de moi comme j’ai besoin d’elle. Elle naîtra seulement lorsque je naîtrais d’être sa mère. Je n’ai rien à faire sinon être là, exister, respirer. Ne pas mourir.
C’est un récit sur le corps de la femme. Cette puissance qui prône en chacune de nous. Virginie Noar explore ce corps sous toutes ses coutures. Celui qui tente et lutte. Celui qui enfante. Celui qui subit les violences obstétricales. Celui qui assouvit les désirs masculins. Celui que l’on tente de s’approprier. Celui qui nous est étranger. Les mots bouillonnent, fusent, parfois cash. Ce corps-objet qui s’adapte, une vie entière, aux éléments de la vie, faisant front, sans cesse, seul.
Il a tout son pouvoir pour naître à la vie si j’accepte de me soumettre à la force des éléments dans la tempête, si je concède à mon corps son pouvoir d’abandon, si je deviens l’alliée de ma douleur. Il a tout en son pouvoir pour faire advenir mon corps de mère. Personne ne pourra dire combien je suis là, à combien de mètres je suis sous les vagues de la naissance, personne ne pourra mesurer la taille de cette transcendance. Personne ne pourra compter la magnitude du tumulte et la force des corps parturients. Eux auront peur, mais moi je serai forte. C’est une évidence.
Le corps d’après est pour moi un texte plein de sincérité. Tout en étant terrible à lire, il m’a fait du bien. Virginie Noar décrit toutes les facettes de la féminité, de ce corps qui change, du rapport qu’on porte à soi-même, des étapes de la vie apportant une certaine maturité, de cette maternité trop souvent idéalisée et qui se brise en un rien. Un premier roman osé. Osant mettre des mots sur la Femme et ses mystères.
Trois millimètres d’une vie fabriquée dans le dedans de mon corps. Trois millimètres de promesses que j’imagine sans retour possible. Mais ce n’est pas imaginable tout ça. Je ne sens rien dans mon corps habité. Mais, sur le petit écran, on le voit bien, que je ne suis plus vide.