En garde- Amélie Cordonnier
Flammarion, août 2023, 234 pages
« Je vais narguer la honte, gratter nos plaies, extraire nos plus sales souvenirs des cellules gélatineuses de mon cerveau et les disséquer un par un. Ce ne sera pas de l’autofiction, ce sera de la vivisection. Je veux écrire cette histoire. Parce que c’est une expérience plus fervente et plus tranchante que l’oubli. »
Cette histoire débute avec un courrier, reçu par l’autrice, le 8 juin 2020. Le service social de proximité lui annonce que sa famille est la cible d’une enquête des services sociaux suite à une dénonciation anonyme.
« Pour moi, la dénonciation anonyme c’était de l’histoire ancienne.
Une histoire que me racontait ma grand-mère,
Une histoire de salauds pendant la guerre,
Qui puait la lâcheté et mettait la vie en danger.
En France en 2020, je croyais que la dénonciation n’existait plus.
Finie, terminée. Enterrée !
Eh bien je me trompais ! »
C’est la descente aux enfers pour Amélie Cordonnier et les siens. Un homme, inconnu, diligenté par les assistantes sociales, s’immisce dans leur vie jusqu’à en prendre possession et la diriger. Plus de repère, plus d’intimité, plus de secret, terminé ! Cet homme suce jusqu’à la moelle cette famille pour la déstabiliser encore plus.
« Un parasite m’apparaît qui s’enkyste en chacun de nous, pénètre notre peau, aspire notre cerveau. Je me rappelle avoir pensé qu’il ne repartirait jamais, qu’il était chez nous pour toujours. Je secoue la tête pour m’ébrouer, tenter de chasser cette idée que je crois bête alors qu’elle ne l’est pas. Pas du tout. »
Un roman oppressant d’une famille déchirée durant de longs mois. J’ai eu le cœur serré du début à la fin. Les mots d’Amélie Cordonnier sont posés, les faits sont là, réels, ainsi elle dénonce une injustice, tenant ainsi une promesse faite à ses enfants et son mari. Ça prend aux tripes, interroge sur un système défaillant qui manque de personnel et de moyen. Je suis admirative de cette famille si aimante, si battante, qui se serre les coudes pour vivre malgré tout au milieu de cette tempête. Un coup de poing !